Facteurs de régulation de potassium

Il existe des facteurs dont le point d’impact est le rein, principal organe d’élimination du potassium, mais également des facteurs extrarénaux qui règlent les mouvements de potassium de part et d’autre de la membrane cellulaire [125, 126].
Régulation au niveau du rein
L’élimination rénale du potassium a été étudiée par différentes méthodes : interruption de flux, calcul de clairances, microponctions.
D’une façon très schématique on peut retenir : que le potassium est ultrafiltré au niveau du glomérule ; que les deux tiers du potassium ainsi ultrafiltrés sont réabsorbés au niveau du tube contourné proximal ; que lors d’apports appauvris en potassium, celui-ci peut également être réabsorbé au niveau du tube contourné distal par des mécanismes faisant intervenir la pompe Na+ K+ ATPase, ainsi qu’un transport couplé avec le chlore ; enfin, que la quantité de potassium finalement éliminée dans les urines dépend avant tout du tube collecteur, dont les cellules sont aptes, soit à réabsorber, soit à excréter l’ion potassium. Le tube collecteur, en particulier cortical, joue un rôle essentiel puisque la concentration intraluminale de potassium à ce niveau peut varier de 5 à 133 mmol·L-1.
Deux facteurs gouvernent en définitive l’élimination rénale du potassium : les apports en potassium et l’aldostérone.
Apports en potassium et kaliémie
incapables d’adapter la sécrétion de minéralo- et de glucocorticoïdes,et que l’on maintient constants les apports en eau, sodium, aldostérone et glucocorticoïdes, on constate une augmentation très importante de l’excrétion urinaire de potassium, qui peut être multipliée par dix pour une hausse de la kaliémie de 1 mmol·L-1. L’organisme est donc bien protégé contre les risques d’hyperkaliémie, même en l’absence d’une augmentation physiologique de la sécrétion d’aldostérone. En revanche, lorsque les apports de potassium sont restreints, l’adaptation rénale est beaucoup moins efficace puisqu’une diminution de la kaliémie de 1 mmol·L-1 dans les mêmes conditions, ne diminue que de moitié l’élimination urinaire de potassium.
Aldostérone
L’élévation de la kaliémie entraîne également une augmentation de la
sécrétion d’aldostérone par le cortex surrénalien, qui stimule l’excrétion de potassium par le tubule rénal. Expérimentalement, lorsqu’on augmente les apports en potassium chez des animaux dont la concentration en aldostérone est maintenue fixe, donc si l’on supprime le feedback exercé par la kaliémie sur la sécrétion surrénalienne de minéralocorticoïdes, on constate une nette augmentation de la kaliémie par rapport à celle des animaux ayant conservé un feedback fonctionnel.Le rôle exact de l’aldostérone en physiologie humaine est difficile à préciser. Il semble cependant que, dans la plupart des situations physiologiques, les élévations de kaliémie soient trop faibles pour augmenter la sécrétion d’aldostérone. En effet, lors d’un apport massif en potassium, l’augmentation de la concentration plasmatique de potassium est limitée par l’effet kaliurétique de l’hyperkaliémie qui est le premier stimulus à intervenir.Le mécanisme d’action de l’aldostérone se situe aux deux pôles de la cellule tubulaire rénale : au niveau de la membrane basale, elle stimule l’entrée du potassium dans la cellule tubulaire à partir du sang périphérique en activant la pompe Na+ K+ ATPase, et au niveau de la membrane luminale elle en accentue la perméabilité au potassium, favorisant ainsi son passage dans l’urine tubulaire.
Autres facteurs
Un certain nombre d’autres facteurs ont des rôles secondaires et intriqués
dans l’élimination urinaire du potassium.
Apport de sodium au niveau du tubule distal
Il augmenterait l’excrétion physiologiques, de potassium en favorisant les échanges Na+ K+. Dans les conditions physiologiques, des variations importantes de l’apport de sodium ne modifient ni l’excrétion urinaire du potassium, ni la kaliémie.
Débit urinaire
Son augmentation au niveau du tube contourné distal est susceptible
d’accentuer l’excrétion de potassium.
Là encore, ce facteur n’intervient pas en physiologie.
Équilibre acide-base
Une alcalose métabolique ou respiratoire aiguë augmente l’excrétion urinaire
de potassium, de même pour l’alcalose métabolique chronique susceptible d’entraîner une hypokaliémie. L’alcalose respiratoire chronique entraîne un effet kaliurétique transitoire, sans hypokaliémie. À l’opposé, l’acidose métabolique ou respiratoire aiguë réduit la sécrétion de potassium par le tube collecteur, ce qui ne se produit pas pour l’acidose chronique.
Glucocorticoïdes
Leur rôle physiologique reste à préciser.
Ils possèdent expérimentalement une action kaliurétique au niveau du tube contourné proximal et du tube contourné distal.
Hormone antidiurétique
L’excrétion urinaire de potassium varie peu dans les situations aiguës d’antidiurèse ou de diurèse aqueuse abondante alors que la sécrétion de potassium est débit dépendante. En fait, l’ADH (antidiuretic hormone) stimule la sécrétion de potassium. Ainsi, des variations opposées du débit urinaire et de la sécrétion d’ADH permettent le maintien d’un bilan nul de potassium, quels que soient les apports hydriques.
Facteurs extrarénaux
Un seul repas est susceptible d’apporter,
chez l’homme, une charge en potassium équivalente à la quantité totale de potassium extracellulaire. Le principal mécanisme, ainsi que le plus rapide, susceptible d’éviter une hyperkaliémie dans ces conditions, repose sur les mouvements de potassium de part et d’autre de la cellule ou » transfert « . Un certain nombre de facteurs modulent ce transfert en agissant soit sur le système actif de pompe Na+K+ ATPase qui gouverne l’entrée de l’ion K+ dans la cellule, soit sur la perméabilité membranaire qui en contrôle la sortie.
Insuline
L’insuline favorise la pénétration intracellulaire du potassium, surtout au niveau des muscles squelettiques, du foie et du tissu adipeux superficiel.
En cas d’élévation de 1 mmol·L-1 de la kaliémie, l’insulinémie est multipliée par deux ou trois [15]. L’administration de somatostatine, en inhibant la sécrétion de base d’insuline, élève la kaliémie de 0,5 à 0,7 mmol·L-1, et l’injection d’insuline exogène ramène la kaliémie à sa valeur normale [32].
L’insuline agit en activant la pompe Na+ K+ ATPase, indépendamment de l’entrée cellulaire de glucose.
Équilibre acide-base
Il est depuis longtemps reconnu que des modifications du pH plasmatique de 0,1 unité pH entraînent une modification de la concentration en potassium de 0,6 mmol·L-1 dans le sens opposé. Ces données sont probablement caricaturales et selon les circonstances de variations du pH, les modifications de la kaliémie peuvent être très différentes. Cela est dû au fait qu’en réalité le pH est loin d’être le seul paramètre à intervenir dans la variation de la kaliémie au cours des désordres de l’équilibre acide-base
[3].Expérimentalement, la variation de pH induite par l’administration d’un acide minéral entraîne une élévation de la kaliémie beaucoup plus importante que celle due à un acide organique. L’alcalose métabolique par administration de bicarbonates entraîne une diminution de la kaliémie, mais d’amplitude moindre que l’élévation due à une acidose métabolique. Enfin, les variations de pH d’origine ventilatoire sont globalement moins influentes sur la kaliémie que les modifications métaboliques. Les mouvements cellulairesresponsables de ces modifications de concentration plasmatique de potassium font intervenir plusieurs facteurs : concentrations en ions H+ mais aussi en bicarbonates. type d’anion minéral ou organique accompagnant l’ion H+.
Catécholamines
Un certain nombre de travaux réalisés, tant chez l’animal que chez le volontaire
sain normal, laissent à penser que les catécholamines jouent un rôle dans les
mouvements du potassium de part et d’autre de la membrane cellulaire. La perfusion d’adrénaline provoque chez le chien une élévation transitoire de la kaliémie suivie d’une baisse qui persiste aussi longtemps que la perfusion [128]. Cet effet biphasique a été trouvé chez le volontaire sain [25]. L’élévation initiale est liée à un effet alpha [108, 141], alors que l’hypokaliémie secondaire fait intervenir les récepteurs bêta-2-adrénergiques [25, 118], par libération ou captation de potassium par les cellules hépatiques et musculaires [15].
Aldostérone
Il est probable que l’aldostérone ait une action extrarénale de facilitation du
transfert intracellulaire du potassium, mais cela n’a pour l’instant pas été démontré.
Osmolarité
Une augmentation importante et aiguë de l’osmolarité extracellulaire par du mannitol ou du fait d’une hyperglycémie entraîne une augmentation de la kaliémie [124] secondaire à la sortie d’eau puis de potassium de la cellule. Ce mécanisme participe probablement à l’hyperkaliémie chez le patient présentant un diabète insulinodépendant déséquilibré.
Conclusion
Le bilan du potassium est essentiellement maîtrisé par le rein sur lequel l’aldostérone est le facteur le plus actif. Les facteurs extrarénaux qui eux, gouvernent la répartition du potassium entre l’extérieur et l’intérieur de la cellule, et donc directement la kaliémie, sont essentiellement représentés par l’insuline dont le rôle physiologique est bien démontré, et probablement par les catécholamines dont le niveau d’intervention est moins bien défini.